Revue des Collèges de Clinique psychanalytique du Champ Lacanien n°10

La répétition à l'épreuve du transfert

Muriel Mosconi
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La répétition à l'épreuve du transfert, voici le thème que se sont donné les Collèges de clinique psychanalytique du Champ lacanien de France pour l'année 2009-2010. Ces deux concepts fondamentaux de la psychanalyse, la répétition et le transfert, s'articulent de manière diverse et la dissymétrie de notre titre, « l'épreuve », évoque une question : « que peut le transfert face à la répétition ? ». Comme le note Freud, la répétition hors transfert détermine la répétition en acte qui, avec son côté jouissance muette et mortifère, évite la remémoration, c'est-à-dire l'inscription symbolique de sa marque. Elle ressortit à l'impossible d'un passage à l'acte qui ne cesse pas de s'écrire. Et elle s'oppose à ce que Lacan dans le discours de Rome nomme « la temporalité historisante du transfert ». Elle a trait à ce qu'il nomme, dans le même texte, « instinct de mort ». Freud nous en donne un exemple avec le passage à l'acte suicidaire de la jeune homosexuelle. Après l'acting out transférentiel à l'égard de son père sous les yeux duquel elle se promène avec sa dame, elle se jette dans le vide, dans un passage à l'acte hors transfert où elle s'identifie au regard de mépris de son père. Derrière la répétition de la temporalité du fantasme se profile l'immémorial de l'objet perdu et ce passage à l'acte aurait pu se répéter sans l'intervention transférentielle de Freud. La répétition des formations de l'inconscient, et, en particulier, celle des rêves de la névrose traumatique, vise, elle, une inscription symbolique au niveau d'un grand Autre transférentiel. Un rêve typique des déportés, que Primo Levi relate dans Si c'est un homme, donne la structure inassimilable et répétitive du trauma dans une mise en abyme : c'est un rêve traumatique qui donne la structure du rêve traumatique. Il s'agit de « la scène toujours répétée du récit fait et jamais écouté ». Je cite Primo Levi : « C'est une jouissance intense que d'être chez moi, entouré de personnes amies et d'avoir tant de choses à raconter [les évènements du camp] : mais c'est peine perdue, je m'aperçois que mes auditeurs ne me suivent pas. Ils sont même complètement indifférents : ils parlent confusément d'autre chose entre eux, comme si je n'étais pas là. Ma soeur me regarde, se lève et s'en va sans un mot. Alors une désolation totale m'envahit, une douleur à l'état pur. » Muriel Mosconi.
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Muriel Mosconi

26/03/2021

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